Selon les résultats du baromètre OPE de 2018, près de 7 salariés sur 10 disent « manquer de temps au quotidien ». Le temps est une donnée essentielle qui rythme à la fois nos vies personnelles et professionnelles. Mesure de performance, ressources à rentabiliser, source de stress… la prise en compte de la variable « temps » est un enjeu crucial pour les entreprises. Comment expliquer et gérer la perception continuelle de manque de temps ?

Manquer de temps quand on en a plus : un paradoxe

La diminution du temps de travail

Le temps fait figure de grand paradoxe dans nos sociétés actuelles. En près d’un siècle, notre rapport au temps s’est vu considérablement modifié par les révolutions industrielles et numériques, mais aussi par les avancées sociales. Le temps de travail, qui était de 10 à 13h par jour en 1900, s’est en effet réduit à une moyenne de 7h par jour dans les années 2000. À ces 35h par semaine s’ajoutent également 5 semaines de congés payés et de nombreux jours fériés.

Même si cette moyenne est largement dépassée dans certaines professions, le temps consacré au travail dans une journée s’est donc en moyenne largement réduit, laissant plus de temps « libre ».

Le gain de temps des technologies

De plus, les révolutions industrielles nous ont également permis de gagner du temps dans les tâches domestiques (machine à laver, robots ménagers, transports…). Plus récemment, les nouvelles technologies ont permis de faciliter les échanges et les communications et ont réduit les distances physiques (email, skype, téléphonie, etc.) Pourtant, de récents sondages ont confirmé un vécu déjà mesuré depuis quelques années : trois Français sur quatre déclarent manquer de temps. Comment dès lors expliquer ce phénomène ?

Le manque de temps, une perception

La relativité du temps

Vous l’avez sans doute remarqué, le temps semble par moment nous échapper alors qu’il peut, à d’autres moments, paraître durer une éternité. Le temps possède cette caractéristique unique d’être à la fois une donnée mesurable tout en étant un élément totalement subjectif. Une même minute peut paraître longue ou au contraire très courte selon l’activité réalisée (une minute de silence ou une minute pour se présenter lors d’un entretien). De la même façon, une minute d’une même activité peut sembler longue pour une personne et trop brève pour une autre personne. 

Le manque de temps nous sort du présent

Pour la plupart d’entre nous, le manque de temps est dû à une impression d’urgence engendrée par les différentes pressions que nous ressentons dans les sphères de notre vie. Nous vivons désormais davantage dans le futur que dans le présent, et rêvons à chaque instant de notre vie à venir. Au travail, même constat. Nous sommes constamment pris dans un tourbillon de tâches à réaliser, et dans des considérations qui nous sortent en permanence de l’instant présent. Or regarder toujours vers l’avenir et ne jamais considérer l’instant nous amène à ne pas percevoir à sa juste valeur le temps qui passe.

Gestion et manque de temps, un enjeu professionnel

Au-delà de ces considérations générales, d’autres caractéristiques propres au milieu professionnel modifient également notre rapport au temps. En effet, dans un monde où tout va plus vite, le temps doit être optimisé, rentabilisé (De Gaulejac, 2018). On mesure le temps et on en connaît le prix à l’heure. C’est une denrée précieuse qu’il faut soigner par une organisation du travail optimale, une division des tâches adéquate et une performance individuelle et collective efficace voire efficiente.

Le manque de temps : un risque psychosocial

Pour autant, mal géré, le temps peut être un risque pour l’entreprise : un risque financier, mais surtout humain. En effet, la course au temps optimisé peut entraîner des stress importants et peser sur le climat de travail et les relations. Cela peut être une source de souffrance. Les différentes perceptions du temps peuvent également perturber l’organisation du travail. La perception que l’on a du temps n’est pas celle du voisin et cela peut causer des incompréhensions au travail : mauvaise gestion du temps, sensation constante de manque de temps, retards ou trop grand ponctualité, etc. Repenser son rapport au travail, prendre le temps de s’organiser, de prioriser devient un temps à perdre nécessaire pour en gagner ensuite. 

Le temps, un paramètre essentiel de notre quotidien que nous ne gérons pas tous de la même manière.

Le « slow management »

Certaines solutions existent néanmoins pour le faire ralentir et ne plus manquer de temps. Dans les rythmes intenses de nos journées, certaines entreprises font le choix d’un « slow management » qui privilégie le fait de prendre son temps. C’est en effet une méthode de management qui remet l’humain au centre du travail. Elle repense la gestion du temps pour se focaliser sur les rencontres entre les managers et leurs équipes afin d’optimiser le temps en fonction des individus (Barthod-Prothade, 2010). Alors, on s’y met ?

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Autrice de l’article : Bonnie Benjamin, étudiante Master PSTO, Université Catholique de Lille

Quelques références sur le manque de temps

  • Barthod-Prothade, M. (2018). Le bien être donne-t-il du sens au travail : produire simultanément une performance économique et sociale pour l’entreprise et du bien-être au travail pour le salarié. Revue internationale de psychosociologie et de gestion des comportements organisationnels, vol 13(46), 123-157.
  • De Gaulejac, V. (2018). Plus on gagne du temps, moins on en a… Le rapport au temps dans la société paradoxante. Dans N. Abert (Ed).@ la recherche du temps : individus hyper connectés, sociétés accélérées : tensions et transformations, 39-51, Toulouse, France, Erès.
  • Observatoire de l’équilibre des temps et de parentalité en entreprise (2018). Résultants 2018 du baromètre OPE de ca conciliation entre Vie professionnelle, Vie personnelle et Vie familiale.